Milos Raonic et Eugenie Bouchard ont plusieurs points en commun — ils sont portés par la volonté de réussir et sont rarement satisfaits.
En 2014, alors qu’elle atteignait les demi-finales des Internationaux d’Australie et de Roland-Garros, puis la finale de Wimbledon, Bouchard avait presque fait un mantra du commentaire qu’elle avait fait après avoir vaincu Ana Ivanovic pour accéder au carré d’as à Melbourne : « c’est quelque chose que je fais depuis l’âge de cinq ans et sur laquelle j’ai travaillé toute ma vie et fait de nombreux sacrifices. Ce n’est donc pas une surprise. J’ai toujours su que j’allais réussir. Je suis simplement heureuse d’avoir franchi cette étape. Je n’ai pas terminé. J’ai un autre match jeudi. »
Après sa victoire aux dépens de Sam Querrey en quart de finale de Wimbledon, en juillet, un gain qui mettait la table pour un affrontement contre Roger Federer, Raonic a dit : « ce n’est pas assez. En arrivant ici, j’avais un objectif bien simple. Tous les membres de mon équipe ont le même objectif. Je crois que c’est pour cela que John (McEnroe) a accepté de se joindre à nous, pour ce même objectif. Ceci est un processus et j’espère pouvoir le faire progresser. »
Bouchard et Raonic ne sont pas le genre de personnes à s’arrêter pour admirer le paysage quand il est question de leur carrière.
Raonic, qui est indéniablement vif d’esprit, peut être un peu trop intense sur le terrain et à l’extérieur des courts.
Avant les Internationaux des États-Unis, Raonic a rédigé un article au sujet de sa motivation pour gagner le tournoi de New York pour le site Web Players’ Tribune.
En être logique, Raonic avait toutes les raisons de croire qu’il pouvait bien performer à Flushing Meadows après avoir atteint la finale de Wimbledon il y a moins de deux mois.
La vie, toutefois, ne suit pas toujours la logique.
Même le grand Federer a eu son lot de chance et a tiré profit des caprices du destin – remportant finalement Roland-Garros, en 2009, alors que Rafael Nadal, roi de la terre battue, était ennuyé par une blessure au genou et distrait par la séparation de ses parents et avait laissé le champ libre en perdant en huitième de finale.
Peu après l’arrivée de Carlos Moya dans son équipe d’entraîneurs, Raonic confiait ceci au sujet de l’Espagnol : « Une fois les matchs terminés, je suis incapable d’éteindre mon cerveau et de relaxer complètement. Je crois qu’il peut m’apporter le calme dont j’ai besoin. »
Moya a sans doute aidé, mais il reste encore beaucoup de travail à accomplir pour inciter Raonic être un peu moins obsessif à propos de certains aspects de sa carrière.
Son entraîneur physique Dalibor Sirola et son physio Claudio Zimaglia sont excellents, mais on peut se demander pourquoi Raonic n’a vraiment été en santé que lors de deux des huit derniers tournois du Grand Chelem — aux Internationaux d’Australie de 2015, où il a perdu en quart de finale contre Novak Djokovic, et à Wimbledon cette année alors qu’il s’inclinait en finale face à Murray.
Cette année, alors qu’il menait deux manches à une contre Murray en demi-finale des Internationaux d’Australie, il a eu un problème d’adducteur. Un malaise à la hanche gauche survenu au troisième tour de Roland-Garros a sans doute été un facteur dans sa défaite aux mains de Carlos Ramos-Vinolas, au tour suivant. Et maintenant, les crampes se sont mises de la partie à New York.
C’est dommage qu’il ait éprouvé ces ennuis, car il a beaucoup progressé au cours des huit derniers mois, principalement au niveau de ses déplacements et de ses volées.
Raonic a participé à deux demi-finales de Grands Chelems — Wimbledon en 2014 et Melbourne en 2016 — ainsi qu’à la finale de Wimbledon, en juillet dernier. Il s’est forgé une place parmi les prétendants aux couronnes des grands tournois. Comme il aura 26 ans le 27 décembre, il lui reste probablement quatre ou cinq bonnes années pour réaliser sa percée.
Il est en bonne posture pour le reste de la saison — il occupe actuellement le troisième rang de la course au championnat de fin de saison de l’ATP World Tour, à Londres. Il possède 4 375 points et n’est devancé que par Djokovic (9 040) et Murray (7 825).
Mercredi, il a commenté que les crampes dont il a souffert durant son match contre Ryan Harrison étaient « probablement causées par la nervosité et le stress — un genre de surexubérance mentale. »
Raonic a sans doute tiré une leçon — aussi douloureuse soit-elle — de ses ennuis à New York. Il veut tout contrôler, mais certaines choses échappent toujours au contrôle, même des meilleurs joueurs.
La principale leçon à en tirer est qu’il doit, parfois, lâcher prise… sans cesser d’y croire.
Ainsi, Raonic, tout comme Bouchard, pourrait regarder un peu plus le paysage qui longe son parcours vers les plus hauts sommets.